• 5 à 7 Philo du dimanche 30 avril 2017 : 12 participants 

    La conscience de soi est-elle une connaissance ?

    Introduction  par Mireille 

    Analyse des termes de la question

    La conscience : conscience vient du latin conscientia  qui est formé de cum qui signifie « avec », et de scientia pour « science », c'est-à-dire avec connaissance, savoir 

    Larousse :

    - Connaissance, intuitive ou réflexive immédiate, que chacun a de son existence et de celle du monde extérieur.

    - Représentation mentale claire de l'existence, de la réalité de telle ou telle chose : L'expérience lui a donné une conscience aiguë du danger

    Cnrtl : [Chez l'homme, à la différence des autres êtres animés] Organisation de son psychisme qui, en lui permettant d'avoir connaissance de ses états, de ses actes et de leur valeur morale, lui permet de se sentir exister, d'être présent à lui-même

    … de soi : ce pronom personnel indique un rapport du sujet avec lui-même

    En psychologie, « soi » est la totalité formée du conscient et de l'inconscient. Il renvoie à une structure associant les informations que l'individu peut recueillir sur lui-même et la manière dont il se comporte en fonction de ces informations.

    L'expression "conscience  de soi"  peut avoir deux sens : 

     1. Elle désigne la connaissance qu'a l'homme de ses pensées, de ses sentiments et de ses actes. 

    2. Elle désigne la capacité qu'a l'homme de faire retour sur ses pensées ou ses actions. C’est ce que l’on nomme « l’examen de conscience » (Simone Manon)

    …est-elle une connaissance : Connaissance : naître avec. On trouve dans les différents dictionnaires comme définition du mot connaissance : Avoir une idée, un savoir. Distinguer, faire la différence. Etre capable de discernement. Admettre une autorité du savoir. Idée d’un objet. On connaît la nature d’une chose et ses propriétés. Savoir sur l’existence d’une chose.

    La connaissance suppose mise à distance de l’objet.  Elle se définit comme un savoir et une idée claire et distincte d’une chose.

    Introduction du débat

    « La conscience de soi est-elle une connaissance ? » Le libellé de la question me dérange parce que par définition la conscience de soi est une connaissance de soi,  tout le problème qui se pose est celui de savoir dans quelle mesure l'impression que nous avons d'être proches de nous-mêmes, l'intuition que nous avons de nous dans nos actes quotidiens ou dans nos pensées suivies, est un savoir véritable et clair.

    On a vu que la conscience est la faculté par laquelle l'homme est capable de penser ce qu'il vit et dès lors de se penser lui-même. S'il ne fait pas de doute que la conscience permet de savoir que l'on est, que l’on existe, sommes nous assurés qu'elle favorise nécessairement la connaissance de ce que l'on est. On a conscience du monde extérieur à soi, mais pour autant le connait-on ?  

    L’existence d'un inconscient ne remet-elle pas en cause l'équation classique qui est de dire : conscience de soi = connaissance de soi ?

    Débat

    Philippe C. : Le mot conscience a évolué, tu es partie de « conscientia » qui veut dire : « connaissance partagée avec quelqu’un. C’est un sentiment (intime ?) et spécialement en tant que connaissance morale avec la notion du bien et du mal ». Ça c’est dès le départ au niveau des romains. Après cette notion elle évolue et elle va rester un peu comme ça jusqu’au 17ème siècle où avec Malebranche le sens commence à changer. On localisait la conscience au niveau de l’estomac (ça m’a beaucoup amusé). C’est logique car c’est la poitrine et se taper sur la poitrine c’est faire son examen de conscience (c’est assez marrant). Ensuite à la fin de 17ème, début 18ème, on voit le sens un peu changer et on nous dit « c’est la faculté qu’a l’homme d’appréhender sa propre réalité ». Alors évidemment c’est Jean Jacques Rousseau, toute cette équipe de philosophes. Et puis au 19ème il y a un bouleversement encore avec Hegel, là il y a une critique de cette approche « naïve » du concept, et faire de la conscience « le fruit d’une médiation sous la forme de prise de conscience de classe » pour Marx, c'est-à-dire la position sociale. Et au début du 20ème c’est Freud qui poursuit cette critique et refuse d’envisager la conscience comme activité autoréflexive d’où tout le champ de la psychologie. Cette évolution est décrite dans «  Le dictionnaire historique de la langue française ». J’ai trouvé que c’était intéressant parce que ça mélange en même temps les notions philosophiques et les notions de l’utilisation courante des mots qu’on dit : examen de conscience, prendre conscience etc.

    Après, sur le mot « connaitre », il y a trois notions qui sont intéressantes : le mot latin cognoscere, comme tu l’as dit « co » : avec, « noscere »  naître et « gnoscere » fait référence à la gnose, là aussi on se retrouve avec des philosophes très anciens. C’est toujours sorti du «Dictionnaire historique de la langue française ». Alors la conscience de soi est-elle une connaissance ?

    Mireille : Une connaissance de quoi ? Obligatoirement une connaissance de soi.

    Anne : Peut-être pas obligatoirement. Dans les recherches que j’ai faites, j’ai trouvé sur le blog d’une prof de philo que « l’expression conscience de soi pouvait avoir deux sens d’une part « elle désigne la connaissance qu'a l'homme de ses pensées, de ses sentiments et de ses actes. », et d’autre part « elle désigne la capacité qu'a l'homme de faire retour sur ses pensées ou ses actions. ». Je ne sais pas ce que vous en pensez la différence est peut être là entre « connaissance » et l’expression « connaissance de soi » ?

    Philippe C. : Dans la question posée il n’y a pas « connaissance de soi »

    Mireille : Oui il y a « conscience de soi » et « connaissance », c’est ce qui me gêne.

    Françoise : Qu’est-ce qui te gêne ?

    Mireille : Parce que « connaissance est indéfini ; une connaissance de quoi ?

    Françoise : De soi

    Mireille : Dans la mesure où pour qu’il y ait connaissance il faut un sujet et un objet, dans la conscience de soi je suis sujet et objet, ça ne peut que m’amener à la connaissance de moi. La conscience que mon voisin a de lui-même n’apporte aucune connaissance à quiconque si ce n’est à lui-même.

    Pierre : Pourquoi ne pas prendre la connaissance dans son sens objectif ? ; à savoir que c’est quelque chose qu’on découvre, qu’on expérimente, qu’on vérifie, dont on prend connaissance ; quand on dit cet arbre c’est un chêne, en nommant, c’est une connaissance. Je crois que la question qui se pose est : « est-ce que la conscience de soi serait un objet scientifique, serait quelque chose à connaitre ? »

    Bénédicte : Dans cet esprit de connaissance avec des caractéristiques, on va vers une connaissance figée : partout dans le monde on décrit le chêne de cette façon là. Appliqué à l’être humain ça me semble compliqué parce qu’on est différent de minute en minute, d’heure en heure et de jours en jours. On évolue énormément. En espagnol par exemple on différencie les verbes  « ser » et « estar » parce que l’être humain est composé d’une partie constante : je suis une femme de ma naissance jusqu’à ma mort, mais par exemple je suis en colère, j’ai des états qui sont différents. Je pense qu’on peut peut-être mettre le niveau de connaissance sur cet état fixe d’un être humain ses caractéristiques claires et nettes de la même façon que le chêne a des caractéristiques claires ; l’être humain a des caractéristiques claires, l’âge, le sexe, la couleur de peau etc. mais à côté de ça on a des états, on est composés d’eau, on se modifie, je pense que cette partie là ne peut pas être assimilée à une connaissance figée, vérifiable, scientifique. La conscience de soi ne peut être qu’en partie une connaissance.

    Françoise : Si on parle de conscience on est obligé de parlé d’inconscient. Il me semble que la connaissance de soi c’est très compliqué, c’est très difficile. D’abord il faut être en présence de l’autre pour avoir connaissance de soi, sinon je m’imagine, je n’ai pas la conscience de moi. Je crois qu’à un moment donné tu l’as dit Philippe dans l’historique de la définition. Chacun a sa réalité, du coup, dans ce que j’appelle « sa carte du monde » c'est-à-dire tout ce qu’on a appris par l’éducation etc. c’est là que ça peut bouger. Avoir conscience c’est aussi avoir conscience de l’inconscient en nous. Je ne peux pas me connaitre si je ne me pose pas des questions, si je ne reviens pas sur moi, si je n’écoute pas ce qu’on me dit de moi, si je ne regarde pas mes comportements. On est toujours surpris quand on s’entend ou qu’on se voit en vidéo, là on apprend beaucoup de choses sur soi. Je pense que c’est le questionnement qui permet d’aller vers soi, en tout cas vers la partie inconsciente de soi.

    Jacques : Je veux bien rebondir là-dessus, ça me fait penser à Albert Jacquard qui disait que si quelqu’un se trouvait seul sur une île déserte, il serait incapable de dire « je » parce qu’il n’aurait pas la conscience d’être là. D’ailleurs, je pense au chien, quand il n’a plus de famille il s’identifie aux hommes.

    Mireille : Pour reprendre les deux idées, quand on étudie l’évolution de l’enfant, il prend d’abord conscience de son corps donc de quelque chose qui est pesable, qui est mesurable. Le bébé ne se différencie pas du monde extérieur notamment de sa mère. Il va petit à petit prendre conscience de ses limites et pour ça il faut bien qu’il y ait la limite de l’autre. Quand on étudie en pédagogie les âges de la vie on voit que ce n’est que vers trois ans qu’il dira un véritable « je », avant souvent l’enfant parle de lui en se nommant, il parle de lui à la troisième personne (Iris veut manger, marcher, etc.). La conscience de l’être humain est donc très lente à s’éveiller, Kant dit « Lorsque l’enfant commence à dire Je, une lumière nouvelle semble en quelque sorte l'éclairer ; dès ce moment il ne retombe plus dans sa première manière de s'exprimer. Auparavant, il se sentait simplement ; maintenant, il se pense. » 

    Anne : Je vais un peu intervenir sur ce que tu dis, mais n’étant pas sûre d’avoir raison. Il y a d’abord la capacité qu’il a à s’exprimer et pouvoir dire « je » effectivement. J’ai vu qu’il y avait ce qu’on appelle les expériences polysensorielles, chez les tout petits, qui évoquent l’émergence  de la conscience, de la conscience de soi pour un bébé ; c’est le « toucher double » c'est-à-dire qu’en touchant quelque chose il a le renvoi ; par exemple, il va se toucher la joue, mais il va aussi sentir sur sa joue le geste qu’il effectue avec sa main. Et c’est ce jeu de toucher double, de double perception, de perceptions polysensorielles qui serait à l’origine de la conscience de soi, et qui donc peut exister avant qu’il ne soit capable, effectivement, de dire « je ».

    Pierre : J’ai été assez sensible à la remarque qu’a faite Bénédicte en essayant de dire que lorsqu’on veut aller vers l’être la conscience de soi est un instrument mais pas seul. Je pense qu’effectivement la problématique de savoir si c’est une connaissance, je dirais que, par exemple dans la science, Newton a approché une connaissance avec la gravitation etc., et Einstein a élargi ce stade en parlant de la relativité ; donc, c’est comme si d’un objet au départ allaient se succéder des parties de connaissances. C’est pour ça que je pourrais dire que la conscience de soi est une partie de connaissance. Donc je dirais « oui, c’est une connaissance », mais je dirais en même temps « elle est limitée, il ne faut pas prétendre à la totalité, à dire tout. J’ai essayé de me dire « la connaissance de soi », « l’intelligence de soi », comme si à chaque fois avant soi je pouvais mettre un autre mot que conscience. Alors est-ce que c’est possible ? Parce qu’on a à chaque fois quelque chose de limité, de partiel. Enfin mon idée c’est ça la conscience de soi c’est une connaissance mais pas toute la connaissance.

    Janine : Pour moi la conscience de soi c’est quelque chose de très passager, on se connait à un moment donné, dans une situation donnée, c’est très passager.

    Bénédicte : Je ne me souviens plus quel scientifique de la conscience a parlé à ce sujet de « statue, miroir ». Jai conscience que je suis comme ça, j’ai conscience que je pense être comme ça, j’ai conscience que l’autre pense que je suis comme ça, et… je ne me souviens pas du quatrième : il décrit quatre façons de se décrire. Quand on essaie de le faire, par exemple « je suis émotive, je pense être émotive c’est pour ça que je le suis… », alors là on part dans des discutions  « je pense que les autres ne me perçoivent pas comme émotive » etc. Il décrit quatre faces du miroir qui je crois nous approchent du juste parce qu’il y a cette idée de « partager avec » dont tu as parlé tout à l’heure et il y a cette idée que c’est une partie en connaissance mais en même temps il y a une partie inconsciente, il y a une évolution.

    Philippe C. : Je voudrais revenir à très loin, il y a un philosophe qui a dit « Gnauthi seauton » c'est-à-dire « connais-toi toi-même ». C’est Socrate, et Platon a fait la démonstration que c’est très difficile de faire ça. Il a pris comme exemple l’Allégorie de la Caverne. Là aussi on voit que d’époque en époque, on modifie la façon d’interpréter cette conscience de soi comme étant une connaissance ou n’en étant pas une. Cette interprétation évolue, on le voit en particulier à partir du 19ème,  et avec Sartre le philosophe qui a parlé de ça. Il démontre qu’il n’y a que la représentation en actions qui peut être considérée comme une conscience de soi. On est que parce qu’on agit. Alors tu disais connaissance, bien oui, on peut connaitre si on connait son acte, mais soi-même c’est difficile. Je pense qu’il y a cette évolution de la pensée qui a modifié le thème même de la question.

    Mireille : La connaissance c’est quand je dis « je sais ». Il y a une conscience qui est quelque part fixe c’est celle que « je sais que je suis depuis ma naissance la même », il y a quelque chose en moi qui fait que je reste « moi ».  Après il y a toutes les fluctuations dont on a parlé.

    Françoise : Je voudrais revenir sur se connaitre soi-même. Se connaitre soi-même c’est aller de l’autre côté, où je crois que je suis, et où en fait je ne suis pas. Je pense que je suis comme ça mais ce n’est pas vrai dans le fond. Il y a des questions à se poser. Alors c’est vrai que le chemin il est sans fin. C’est toujours en me confrontant à l’autre que je peux me connaitre.

    Et puis, quand tu parlais de Sartre, quand il dit « l’enfer c’est les autres »je ne crois pas du tout ça, je pense que ce qu’il voyait chez les autres c’était une partie de lui-même. L’autre va me déranger parce qu’il y a une partie de moi dans l’autre, sinon il ne me dérange pas. C’est ça la connaissance de soi, la conscience de soi ; C’est aussi ce qui permet d’aller vers l’autre. Et de ne pas le juger. C’est un chemin qui mène beaucoup vers l’autre et l’acceptation de la différence et vers moins de préjugés.

    Philippe C. : Tu parles des deux côtés, du côté obscur.

    Françoise : Oui, je parle de l’ombre, c'est-à-dire aller vers ce qu’on ne voit pas.

    Anne : Mais est-ce que ce n’est pas la conscience de soi qui permet de réfléchir et d’y aller ?

    Madeleine : Je voudrais juste simplement dire que c’est important d’être bousculé, il faut accepter d’être bousculé ; je pense que c’est comme ça qu’on évolue, que c’est comme ça qu’on peut prendre un peu de recul, qu’on peut découvrir autre chose. Ça fait partie de la connaissance de soi. Oui, je pense que bien des choses commencent par soi ; alors je ne dis pas qu’on a la solution, certainement pas, c’est vrai que c’est évolutif, que rien n’est statique, c’est très bien, mais je pense qu’il faut accepter la confrontation, il ne faut pas avoir peur d’aller vers ce qui dérange.

    Mireille : La connaissance d’un objet sous entend qu’il y ait une lucidité, c’est clair, c’est défini, or dans la conscience de soi je trouve qu’il y a beaucoup d’intuition, on en parlait la dernière fois. Il y a des choses qu’on sent sur soi-même sans pouvoir les nommer. La connaissance c’est scientifique, c’est un arbre, une table, tu t’appelles Françoise etc. Alors que dans la conscience de soi, il y a beaucoup d’intuition qui comme on l’a dit la dernière fois est « une connaissance soudaine, spontanée, indubitable », une « connaissance directe, immédiate de la vérité, sans recours au raisonnement, à l’expérience ». Nous n’avons pas forcément les mots pour le dire parce que, malgré tout ce qui bouge comme tu l’as dit Bénédicte, avec le temps on se rend compte qu’il y a quelque chose en moi de constant, pas toujours définissable, mais qui est « Moi » et qui me permets de dire un vrai « Je ». Entre aujourd’hui à 70 ans et quand j’avais 18 ans, je sens qu’il y a quelque chose de moi qui a été constant, et qui est mon « moi ». Mais comment le définir avec des mots ?

    Anne : Tu dis mon « moi ». A un moment je me suis dit qu’on pourrait écrire conscience de soi avec un petit « s », ou avec un grand « S ». Je crois qu’on ne peut pas faire l’impasse et ne pas parler des philosophies indiennes en particulier, et de celles qui proposent le travail de la méditation. Cette forme de méditation qui a justement pour but de retrouver cette conscience de soi qui est assez indéfinissable et qui a, comme tu le dis, quelque chose d’intangible, qui est toujours là difficile à exprimer ; mais cette chose qui est intangible  permet en même temps l’ouverture , et d’aller justement vers la connaissance. Je ne sais pas si on peut comparer ça au conscient et au subconscient, mais il y cette espèce de chose de retour sur soi qui n’est pas comme un trou noir, où on est complètement retourné sur soi, mais qui en même temps est d’une très grande ouverture qui permet d’’ aller vers toutes connaissances.

    Pierre : Je vais essayer de tenter une première petite synthèse ; d’abord ce que j’observe c’est que finalement le mot « connaissance » il est à un instant donné. À un instant donné on a connaissance de quelque chose, et à un autre instant cette connaissance va bouger, va s’approfondir, va s’agrandir, va s’élargir. La deuxième chose, c’est l’être. On se pose la question de ce qu’il est en substance ; il y a une tendance qui dirait qu’il y a quelque chose d’immuable, d’assuré : c’est l’espèce dans son histoire à un moment donné ; mais en même temps, ça voudrait dire que la connaissance est mouvante, parce qu’il va y avoir un mouvement permanent entre cet être immuable, ce grand Soi dont tu parles, et le petit soi pour tenter progressivement d’approcher sa totalité d’être, si on peut considérer que l’être est intangible quelque part. Il est intangible, on pourrait penser à la métaphore de l’arbre avec le tronc et toutes ses branches qu’il va falloir poser les unes après les autres pour tenter de définir l’être tel qu’il est, enfin ce que nous sommes chacun parce qu’il est vrai que nous sommes tous différents.

    Jacques : On a parlé de conscience mais on peut aussi parler d’inconscience parce qu’il y a des gens qui sont inconscients, par exemple sur la route, ils ne savent pas ce qu’ils font. Je pense que la conscience est enrichie par la connaissance. Si je sais pourquoi je dois rouler à droite je le ferai parce que je sais que j’éviterai le danger. Je pense que la relation entre conscience et connaissance est une relation d’enrichissement mutuel, sachant que la conscience est quelque chose qui est sur un fil rouge parce qu’elle évolue avec le contexte. Tout à l’heure, en parlant de connaissance, j’ai entendu dire « je sais », là on est dans le domaine du savoir et connaissance et savoir sont deux choses différentes, on peut connaitre et ne pas savoir faire, ne pas savoir appliquer ses connaissances. La connaissance c’est j’ai une valise et je la remplis, le savoir c’est je l’ouvre et je me sers de ce qu’elle contient. On peut connaitre le code de la route et être un mauvais conducteur parce qu’on ne sait pas l’appliquer.

    Mireille : Je me suis fait la réflexion avec ces deux mots « conscience et connaissance ». Dans le langage courant on dit d’une personne qui s’évanouit « elle perd connaissance » et quand elle se réveille de son malaise « elle reprend conscience »

    Bénédicte : J’aimerais bien réentendre les définitions que vous avez données de connaissance.

    Mireille : Celle que j’ai donnée c’est « naître avec, avoir une idée, un savoir. Distinguer, faire la différence. Etre capable de discernement. Admettre une autorité du savoir. Idée d’un objet. On connaît la nature d’une chose et ses propriétés. Savoir sur l’existence d’une chose.

    La connaissance suppose mise à distance de l’objet.  Elle se définit comme un savoir et une idée claire et distincte d’une chose. » Philippe tu en as donné d’autres ?

    Philippe C. : Non, c’est celle la, « cognoscere » c’est naître avec, « idée accomplie de savoir et de reconnaitre » L’idée de reconnaitre est importante parce que ça renvoie à tout ce qui est quelque chose qu’on connait et qu’on re-connaitrait.

    Bénédicte : En réentendant la définition je vois que ça colle avec tout ce qu’on a pu dire de la conscience, parce qu’il y a à la fois cette notion d’évolution, à la fois d’objet qui s’extériorise, qui se regarde, qui reconnait qui il est.

    Mireille : J’avais noté que le terme le plus ancien connu pour ce qu’on appelle conscience aujourd’hui : est le mot « suneidésis » en grec utilisé par Démocrite qui dit « il y a des hommes qui ont conscience de la vie perverse qu’ils mènent, ils se rongent d’alarme et de frayeur. ». C’est ce mot grec « syneidésis » que l’on traduira en latin par «conscientia ». On peut traduire ce terme de syneidésis par « savoir avec ». Il y a  alors deux sens possibles alors « savoir avec quelqu'un... » La conscience est alors comprise comme sujet, témoin ou encore complice d'une action commune. Pour le chrétien, ce sera savoir avec Dieu ce qui participe à la connaissance morale. C'est aussi « savoir avec science » avec sagesse. Cela nous renvoie davantage aux notions  de compétence, d'une assurance dans  la démarche.

    Françoise : Je ne suis pas tout à fait d’accord avec cet apprentissage par cœur. Je ne suis pas d’accord non plus avec le « je pense donc je suis ». Tout à l’heure, Philippe, tu parlais du geste sur l’estomac, on est entrain de découvrir que notre estomac et nos intestins sont pleins de neurones qui communiquent avec notre cerveau qu’ils sont un deuxième cerveau. On ne sait pas comment ils communiquent ; ça peut être les intestins qui communiquent au cerveau donc ça part du corps, moi, j’ai envie de dire de l’émotion. C’est vrai que dans le savoir thérapeutique on le savait déjà que les intestins étaient très innervés, mais qu’il y a des neurones, c’est assez extraordinaire. Donc j’ai presque envie de dire « je ressens donc je suis » ça me parait beaucoup plus juste parce que nos pensées sont souvent de l’appris.

    Mireille : Il y a aussi, dans ce ressenti dont tu parles, cette idée d’intuition.

    Françoise : C’est plus dans quelque chose d’émotif que d’intuitif. En tout cas, ça bouge dans le corps.

    Philippe C. : Ça bouge dans le corps, encore faut-il savoir par où ça passe ; ça peut bouger directement, ou ça peut bouger par l’intermédiaire d’une pensée, ce n’est pas forcément par celle d’une émotion. Ça peut entrainer une émotion mais ce n’en est pas forcement une au départ.

    Jacques : D’où l’expression «  ça prend aux tripes »

    Bénédicte : Je ne me rappelle plus pourquoi est-ce qu’on parle de l’estomac, c’est parce que la conscience les romains la plaçaient là ?

    Philippe C. : Pas la conscience mais tout ce qui était de l’ordre de l’esprit c’était là le cœur.

    Bénédicte : On a parlé de l’estomac au départ c’est différent du cœur. Au niveau de la philosophie hindoue autant qu’en médecine chinoise,  il y a le Hara, il y a le Dantian (Bénédicte montre le ventre et un pont au bas des côtes), c’est le centre énergétique et en effet quelles que soient les informations qu’on reçoit au niveau sensitif ou au niveau intellectuel c’est par là qu’on les reçoit et c’est à partir de là qu’on peut se ressourcer. Donc je pense que ce n’est pas une faute de dire l’estomac et pas le cœur parce que si on envoie de l’énergie à ce niveau là après ça va se diffuser vers le cœur, le cerveau etc.

    Mireille : C’est ce qu’on appelle chez nous le plexus solaire.

    Bénédicte : On peut dire de la conscience de soi qu’ une partie est immobile, une partie est mobile, une partie est ressentie, une partie est complètement figée par l’extérieur ; cette différence entre connaissance et savoir, tout ça transite à travers nous. Quand vous définissez la connaissance on voit que ça bouge et que ça ne bouge pas il y a ces deux notions de mobilité et d’immobilité, c’est vraiment une connaissance avec une partie qui vient de l’extérieur qui est figée qui serait du domaine scientifique, on peut en faire l’expérience qui est vérifiable à chaque fois et une partie qui est plus empirique, ou dogmatique, ou ésotérique, une partie qui est vraiment très intuitive, qui est énergétique, ce qui fait qu’à un moment on a une prise de conscience. On a un environnement qui vient faire raisonner, à un moment, en nous une prise de conscience.

    Philippe C. : Dans ce sens là Montaigne dit «  Je ne peins pas l’homme, mais je peins le passage. » et Yung dit la même chose. C’est cette espèce de transformation  entre conscience/connaissance et cette espèce de passage.

    Pierre : Je voudrais relater quelque chose qui est plus personnel : J’ai depuis quelques temps des nuit agitées, et ce que j’ai remarqué c’est qu’en me couchant, par exemple quelquefois je suis placé devant ce que je nomme un problème insoluble et curieusement si je me réveille vers 3h du matin, ces derniers temps j’ai vraiment mal au ventre ou à l’estomac ; et ce qui est surprenant ce mal à l’estomac me conduisait à mettre mon intelligence au travail pour chercher, pour tenter de comprendre ce qui ce passait et de trouver une solution. Je ne sais pas quel rapport ça a, mais il y a d’une certaine manière, donc, mon estomac qui me dérangeait, me réveillait, me faisait prendre conscience de l’état dans lequel j’étais, mais en même temps ça ne s’arrête pas là, ça tentait de parler de comment je pourrai connaitre le sujet qui m’échappe. C’est toute une élaboration qui se fait naturellement.

    Brouhaha :

    Pierre : Quand on parle d’un deuxième cerveau, j’aurais plutôt tendance à dire qu’il y aurait une communication qui se ferait, la pensée qui enverrait les informations à l’estomac pour dire « il y a quelque chose qui ne va pas, alors vis le » ; je n’ai pas tellement l’impression que le chemin est inverse.

    Philippe C. : Vous parlez de neurones, on n’a pas trouvé de vrais neurones dans l’intestin, on a trouvé des structures qui ressemblaient aux neurones. Ce sont des structures neuronales identiques à celles du cerveau.

    Anne : La moelle épinière, ça fait bien partie du cerveau, et après ça se dispatche à travers le corps, est-ce que c’est ça qui part aussi dans l’intestin ? Je suis complètement ignare sur ce sujet, j’ai vaguement entendu parler du deuxième cerveau. Mais, tout ça c’est le cerveau, on a tendance à le figer au niveau de la tête parce que dans la boite crânienne il y a quelque chose qui a été très étudié, mais tout ce qui est en lien avec le cerveau, ça en fait partie et ça envoie des informations.

    Françoise : Ça c’est la vraie conscience de soi parce qu’on n’est pas dans la pensée. Il y a quelque chose, il y a une émotion quelque part, une peur ou autre, souvent ce qu’on ne peut pas nommer et ce qu’on ne voit pas. Ça fait partie de la connaissance de soi, plus passer par là que par la pensée qui elle peut nous tromper.

    Pierre : Tu veux dire que la conscience de soi interpelle tout le corps humain

    Françoise : Oui, c’est ça

    Pierre : Donc, entrer dans un champs de connaissance ça serait déjà reconnaitre ça.

    Bénédicte : Ça va au-delà du corps parce que tout ça c’est lié à la mémoire aussi, à la mémoire de ce qu’on a vécu, de ce qu’on nous a enseigné. Il y a une histoire de mémoire là dedans, d’interprétation ensuite. On sait qu’il y a trois types de mémoire à peu près ; il y a la mémoire d’échange qui est un peu celle de ce petit garçon qui est belliqueux parce que de génération en génération il y a eu tellement de guerres entre eux. Cette expérience qu’ils ont fait par exemple sur les codages militaires, le morse, ils ont essayé d’en créer d’autre depuis et ça n’a pas pris. On apprend plus facilement quelque chose de transmit de générations en générations que quelque chose qui vient d’être inventé récemment parce que c’est inscrit dans notre mémoire génétique. Il y a aussi la mémoire psycho sensorielle, on a vu qu’une chienne séparée de ses petits réagissait quand ceux-ci étaient tués ; il y a aussi tout ce qu’on nous a enseigné, on est le mélange de tout ça.

    Jacques : Françoise Héritier qui est anthropologue, ethnologue, a étudié cette mémoire dont on hériterait, mais rien n’est démontré.

    Pierre : Bénédicte, quand tu relates que ça irait encore plus loin, tu veux dire que nous serions en capacité de mettre en accord un élément qui se passe avec un autre qu’on ignore ; cette réaction de la chienne à la mort de ses petits, ça m’interpelle. Qu’est-ce qu’on peut faire de tout ça.

    Françoise : C’est l’effet papillon.

    Mireille : Je ne vois pas le rapport de ce que vous dites avec la conscience de soi.

    Bénédicte : Parce que si je ne peux pas expliquer pourquoi je suis agitée là, pourquoi je réagis ainsi c’est parce qu’il y a une autre énergie, des raisons différentes de moi. C’est prouvé maintenant qu’il y a cette espèce de conscience de groupe qui fait que ce matin je ne me sens pas bien et qui prédomine sur ce que je suis à ce moment là.

    Philippe C. : Je pense qu’on n’est pas dans notre sujet. Par rapport à la question, c’est un autre sujet, savoir comment ça fonctionne, ça c’est une autre interrogation qui fait plus partie de la connaissance que de la conscience de soi. Un phénomène, on peut l’observer, on peut en faire une connaissance, un savoir, mais avoir conscience de soi, c'est-à-dire se prendre soi-même comme objet et non plus comme sujet, comment fait-on ?

    Mireille : Je crois que ce qu’elle voulait dire c’est qu’on peut avoir conscience de nos pensées et de nos actes mais qu’on peut en ignorer les causes.

    Françoise : Je pense que pour avoir conscience de soi il faut se poser des questions, mais on ne peut pas non plus se poser des questions tout le temps, il y a d’autres chemins comme la méditation qui permettent la conscience de soi, mais je pense que ça passe par une introspection qui est obligatoire, sinon je ne peux pas avancer, « je pense que je suis » seulement.  Tu disais il faut prendre des risques, si je ne prends pas de risques, si je ne me confronte pas, je ne peux pas me connaitre, ce n’est pas possible. Et ça passe par l’introspection qui va bouger, tu disais tout à l’heure que ça bouge tout le temps, c’est sans fin, ça me passionne parce que c’est la vie. C’est sans fin c’est un pays de connaissances, je ne fais pas la différence entre conscience et connaissance, je trouve que c’est de la connaissance qui va me mener très loin. C’est vrai qu’on ne connait pas toutes nos réactions dans les moments de panique, de peur, on ne sait pas du tout comment on va réagir. Dans ces moment là on est obligé de se découvrir, on ne sait pas si on va être tétanisé ou si on va réagir, ce n’est pas possible de le savoir. Le fait de ne pas se poser de question c’est ne pas être dans la vie.

    Mireille : Mais si on s’en pose trop on sort de la vie aussi car on n’agit pas.

    Philippe C. : J’ai lu cette phrase : « Pour qu’un sujet, une conscience, une liberté puisse faire l’expérience pure de son être, l’ascèse d’une méditation métaphysique est nécessaire. Cette méditation est moins le dévoilement d’une essence qu’assignation à une tâche spirituelle et morale. » Je pense que c’est ou de Descartes ou de Pascal que je n’aime pas beaucoup.

    Anne : Je pense que l’expérience de la méditation apporte quelque chose de très important. Et je ne suis pas de ton avis car je trouve que Descartes quand il dit « Cette vérité : je pense, donc je suis était si ferme et si assurée que toutes les plus extravagantes suppositions des sceptiques n'étaient pas capables de l'ébranler », c’est quand même formidable d’en être arrivé là et dire « je pense donc je suis »

    Françoise : C’est ce qu’on a appris : le raisonnement, on n’est pas sur le même cerveau.

    Anne : Tu peux penser ce que tu penses comme tu peux méditer sur la méditation.

    Françoise : La méditation c’est arrêter ses pensées.

    Anne : Il y a toutes sortes de méditations.

    Françoise : Dans méditation on est encore dans la pensée du coup on quitte le corps et si je quitte le corps je ne suis plus moi.

    Anne : Mais ce n’est pas quitter le corps, mais bon on ne va pas entrer dans un débat sur la méditation. Je trouve que Descartes, pour avoir éliminé tout ce qu’il pouvait éliminer pour en arriver à dire « Je pense donc je suis » c’est extraordinaire.

    Philippe C. : C’est même arriver à dire « je me pense »

    Katy : C’est pour ça qu’on s’appelle l’homo sapiens-sapiens, c’est qu’on sait qu’on sait.

    Anne : Savoir qu’on ne sait rien c’est aussi un savoir.

    Brouhaha

    Jacques : Il y a une chose qui m’interpelle, c’est la notion de faire des choses intuitivement. Quand je roule je suis parfois incapable de dire si j’ai tourné à droite ou à gauche, s’il y avait un feu rouge et pourtant j’ai respecté le feu rouge,  c’est comme si la conscience disparaissait. Quand on fait des apprentissages de choses techniques on apprend à faire des gestes machinalement. Pour assurer la sécurité  dans la formation de pilote on apprend toutes les situations dégradées parce qu’en fait quand ça nous arrive on n’a pas peur et on fait les gestes qu’il faut faire de manière inconsciente. Donc, l’apprentissage aurait un rôle d’anesthésiant de la conscience, peut-être, je me pose la question.

    Brouhaha : C’est la mémoire… c’est un réflexe…

    Bénédicte : Du coup c’est le cerveau reptilien qui fonctionne.

    Philippe C. : Qu’est-ce que c’est le cerveau reptilien ?

    Brouhaha (rires)

    Philippe C. : Je connais le cerveau archaïque, mais reptilien non, je n’ai jamais pris les serpents pour des imbéciles.

    Brouhaha (rires)

    Mireille : Archaïque ça nous fait penser qu’on est des vieilles branches, reptilien marque notre rapport avec le monde animal, ce n’est pas quelque chose de négatif, c’est ce qu’on a de commun avec l’animal.

    Brouhaha : (échanges indéchiffrable sur cerveau archaïque/ cerveau reptilien)

    Bénédicte : L’animal sauvage en situation de danger peu avoir trois réactions : il fuit, il se fige ou il attaque. C’est la définition du cerveau reptilien. L’être humain a depuis développé tout un tas d’autres stratégies, et de préventions.

    Pierre : Cette formulation de cerveau archaïque me gène parce que ça fige ; archaïque c’est qui se perd dans la nuit des temps. Je pense que la formation du cerveau elle est au commencement, il va se développer, il va y avoir un phénomène d’évolution qui fait qu’à un moment donné quelque chose va naître. Alors c’était quoi ce cerveau de départ, ça va servir à quoi pour qu’on arrive à la conscience ? On a un cerveau et nous le pensons. Mais peut être qu’en découvrant ces trois mouvements que décrit Bénédicte, ce premier cerveau agissait pour amener l’être animal vers ces trois comportements.

    Anne : Est-ce qu’un de ces trois comportements face à un danger n’est pas la preuve qu’il y a déjà une conscience de soi, la conscience du danger étant sans doute une conscience de soi ?

    Katy : Ça relève surtout de l’instinct de survie. On a peur du danger après ce qui c’est passé, heureusement qu’on réagit avant d’avoir l’émotion.

    Jacques : Ce qu’on a peut-être pas évoqué c’est la notion de dosage entre tout ça, parce que  la conscience n’est pas binaire, ce n’est pas 0-1, il y a des dosages et je pense qu’il y a des moments où il y a des points de basculement. C’est comme la connaissance, on a un niveau de connaissance et sur certains plans on va prendre une décision ou pas suivant le niveau de connaissance qu’on en a. Je pense que, comme disait un certain chanteur, la vérité est gris foncé ; ce n’est plus noir ou blanc. Je pense que c’est dans le dosage qu’on peut trouver des réponses. Tu parlais de l’effet papillon tout à l’heure, c’est ce qu’on appelle des signaux faibles qu’on peut scanner. On sait que dans la valise des causes il y a une toute petite cause qui a beaucoup plus d’influence qu’on ne pense, c’est important de mesurer ça. C’est difficile de mesurer car on n’a pas d’outils. En technique on y arrive à peut près.

    Françoise : C’est ça le problème car on a tendance à répéter ce qu’on a appris. C’est très compliqué parce qu’en effet on n’est pas dans le dosage, on va aller dans le noir ou blanc. On le voit aussi dans la société, on peut prendre n’importe quel sujet, ça nous représente. On voit très bien qu’on passe toujours d’un extrême à un autre. On ne peut pas aller dans le gris ou le rose parce qu’on n’a pas les outils pour. Il y a pourtant la méditation qui est un outil, ou l’hypnose, cet instant entre veille et sommeil où on quitte notre cerveau raisonnement pour aller plus proche de soi, ça demande quand même de la discipline et ça demande, j’ai envie de dire, de se bouger un petit peu, de ne pas rester dans ses acquis.

    Mireille : On parlait de l’inconscient qui entrave la conscience de soi, quelle est la part de l’illusion aussi ?

    Françoise : C’est quelquefois tellement difficile d’aller dans la réalité.

    Mireille : L’illusion, j’avais pensé au mensonge aussi, se mentir à soi-même en toute sincérité, en toute honnêteté. Illusion et mensonge sont en fait des moyens de protection.

    Pierre : C’est une manière de se détourner de l’image que nous renvoient les autres et qui est douloureuse.  La conscience de soi serait de reconnaitre, de distinguer à quel moment je me berce d’illusions. La conscience de soi, pour que ça devienne une connaissance, c’est comme si on épluchait un fruit, on enlevait toutes les scories, toutes les impasses dans lesquelles  nous ont mis le mensonge, l’illusion, la rêverie, pour aller, rassurés, vers soi.

    Bénédicte : Le mensonge et l’illusion peuvent être conscients ou inconscients, dans un cas ils sont connus et appartiennent à la connaissance et dans l’autre non.

    Mireille : A propos de la conscience, du besoin d’autrui et de la communication dont on a parlé la dernière fois, j’ai noté une phrase de Nietzsche : « La conscience, en général, n'a pu se développer que sous la pression du besoin de communication »

    Pierre : On revient à ce qu’on disait au début, c’est qu’on existe que sous le regard de l’autre et que sans lui le « je » n’existerait pas. C’est une connaissance que de savoir que la conscience de soi ne peut pas être sans l’autre.

    Brouhaha : (sur la peur)

    Fermeture Débat par Mireille

    La conscience de soi est-elle une connaissance ? On peut dire que c’est une connaissance de soi, mais comme l’écrit  Simone Manon ( PhiloLog - http://www.philolog.fr ) «   La conscience de soi n’est pas spontanément une connaissance de soi. Il faut, pour prétendre à une connaissance, quelle qu’elle soit, s’affranchir de tout ce qui aveugle car la lucidité et le souci de la vérité sont des conquêtes. Il y faut aussi de nombreuses médiations. »

    Je pense que ces médiations passent par l’Autre au sens le plus large du terme c'est-à-dire tout ce qui n’est pas Moi, donc à sa connaissance. Je dirais que je ne peux pas avoir conscience de moi, me penser et me connaitre hors du monde qui m’entoure.

    Citation lue par Anne

    Rabindranath Tagore (Sadhana) : « Dans le domaine de la conscience comme dans celui de la connaissance, l’homme doit réaliser clairement une vérité centrale qui ouvre une vision sur le champ le plus vaste possible […] Connais l’âme qui est la tienne. » 

    Que vous ayez été présent ou non à cette rencontre, si vous voulez apporter un complément à ce débat, n’hésitez pas à faire un commentaire en cliquant ci-dessous.  Vous pouvez être avertis des commentaires faits en vous inscrivant à la Newsletter. Merci pour votre participation et rendez-vous Dimanche 28 mai (même heure, même lieu) 

    La question choisie à mains levées, sera: « L’homme est-il violent par nature ? ? » 

    Le thème choisi pour  septembre est  « Les préjugés ». Préparez vos questions. 

    Mireille PL 

     


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